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Le budget 2025 fragilise gravement l’innovation made in France

Lettre ouverte des associations de l’écosystème d’innovation au Premier ministre


Le budget 2025 fragilise gravement l’innovation made in France
Dans le cadre du PLF 2025, France FinTech et 15 associations représentatives de la tech appellent le gouvernement à préserver le statut JEI et revenir sur les coupes budgétaires qui fragilisent l'innovation et l'attractivité de l'écosystème (CII, BSPCE, CIR).

Monsieur le Premier ministre,

L’innovation est bien plus qu'une question technologique : elle est un pilier de notre souveraineté et un levier essentiel de notre compétitivité à l’échelle mondiale. Le Sommet pour l'action sur l'intelligence artificielle en est la parfaite illustration, confirmant la place centrale de la France dans la course à cette technologie stratégique qu’est l’IA. Avec des atouts indéniables en recherche, les meilleurs talents et des infrastructures de pointe, notre pays a toutes les cartes en main pour transformer son économie et façonner un avenir où l’IA devient un vecteur de progrès, tout en garantissant notre indépendance. La réussite de ce pari passera également par une industrie forte, décarbonée et tournée vers le futur grâce à nos startups industrielles, qui contribuent à la réindustrialisation de nos territoires.

Malgré ce dynamisme, les arbitrages budgétaires récemment actés dans la loi de finances pour 2025 menacent l’avenir de notre recherche et du développement de l’innovation française, affaiblissant ainsi la capacité de nos entreprises innovantes à rivaliser avec les grands acteurs extra-européens et à proposer des solutions permettant à nos concitoyens de mieux se soigner, de mieux consommer, de mieux se déplacer et de mieux comprendre le monde. Nous pensons à :

  • La suppression de l’avantage "Jeune docteur" dans le crédit d’impôt recherche. Ce dispositif permet de combler le fossé entre la recherche publique et les entreprises. Désormais, nos TPE et PME innovantes ne seront plus incitées à recruter des docteurs, qui partiront de facto
    à l’étranger, et ne tireront plus profit de l’excellence de notre recherche pour industrialiser ses résultats sur le marché.

  • La suppression des dépenses de brevets dans le crédit d’impôt recherche. Cette décision vient affaiblir la recherche fondamentale et appliquée, et limitera fortement notre capacité à être souverain et à réindustrialiser la France. N’oublions pas que plusieurs brevets sont à l’origine d’entreprises et d’innovations dans des secteurs stratégiques comme la santé et l’IA.

  • L’affaiblissement du crédit d’impôt innovation, dont nous saluons néanmoins la prorogation, qui impactera sensiblement la trésorerie des TPE et PME qui en bénéficient.

  • La réduction de 30 % de l'enveloppe du plan France 2030 pour 2025, qui ralentira ou reportera des projets structurants sur les plans technologique et industriel.

  • L’inéligibilité au sursis d’imposition, en cas d’apport ou d’échange de titres, des bons de souscription de parts de créateur d’entreprise (BSPCE) émis après l’entrée en vigueur de la loi de finances. Cela va complexifier les opérations de rachat de startups.

Dans un contexte géopolitique où les États-Unis renforcent massivement leurs investissements et où la Chine déploie des moyens colossaux pour dominer les industries stratégiques, il est incompréhensible que nous choisissions de freiner nos efforts en matière d’innovation. Ces arbitrages envoient un signal préoccupant aux entrepreneurs, chercheurs et investisseurs de notre pays, et sont en contradiction avec
l’ambition affichée lors de ce Sommet de faire de la France un champion de l’intelligence artificielle.

Si la French Tech est mondialement reconnue et que nous avons su faire émerger des acteurs dans des secteurs de la Deeptech comme l’IA, la cybersécurité, les nouveaux matériaux, l’énergie, la biotech, l'alimentation et l’agriculture de demain, le spatial, le quantique et les semi-conducteurs, c’est grâce à la construction d’un environnement stable et attractif. Mettre un coup d’arrêt à cet élan, c’est prendre le
risque de voir ces acteurs partir s’installer là où les conditions seront plus favorables, de freiner la création d’entreprises sur notre sol et d'aggraver les chiffres du chômage.

Nous mesurons l’effort qui doit être fait pour équilibrer le budget du pays et sommes prêts à prendre notre part. Pour autant, il est crucial de préserver les dispositifs clés qui permettent à nos entreprises d’innover, de recruter et de positionner la France au centre du jeu technologique et industriel. Ces dispositifs ne sont pas des « cadeaux » aux entreprises. Ils viennent en partie compenser le poids de nos
prélèvements obligatoires – qui sont parmi les plus élevés de l’OCDE – et génèrent des recettes et des bénéfices directs pour le pays. Ainsi, à l'aune de ces arbitrages, nous appelons le gouvernement à :

  • Préserver, dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale, le statut de Jeune entreprise innovante (JEI) en maintenant le seuil de dépenses de R&D à 15 %, afin de ne pas exclure des centaines de startups prometteuses du dispositif. L’augmentation de ce seuil à 20 % se traduirait par une modification brutale du coût du travail pour une partie importante de leur masse salariale et donc par des gels d’embauche, voire des suppressions de postes.

  • Réintégrer l’avantage "Jeune docteur", a minima pour les TPE et PME, et les dépenses de prise et de maintien de brevets dans le crédit d’impôt recherche.

  • Maintenir la prorogation du crédit d’impôt innovation jusqu’à fin 2027.

Monsieur le Premier ministre, affaiblir l’innovation aujourd’hui, c’est fragiliser la France de demain. Notre pays – nous sommes sûrs que vous partagez cette conviction – ne peut pas se permettre de sortir de la course, sinon quoi nous dépendrons éternellement des autres. Ne reproduisons pas les erreurs du passé, notamment celles liées au cloud. Notre souveraineté est trop cruciale pour être reléguée au second plan.

Nous devrons toujours, comme c’est déjà le cas avec l’IA, investir massivement pour combler un éventuel retard. Les dispositifs précités s’inscrivent en amont de cette dynamique et permettent de positionner la France à l’avant-garde des révolutions à venir. Les maintenir représente donc un investissement stratégique pour la France. Nous sommes prêts à travailler avec vous pour créer les conditions favorables à leur maintien et, car nous faisons preuve de pragmatisme, à proposer des économies alternatives qui ne remettront pas en jeu la compétitivité de nos entreprises, ni leur faculté à embaucher et à innover dans l’intérêt de tous.


Mercredi 19 Février 2025



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