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Retenir et fidéliser les profils «  tech  »

Entretien avec Vincent Luciani, CEO d'Artefact, société de conseil en services data


Retenir et fidéliser les profils «  tech  »

Retenir et fidéliser les profils «  tech  »
Pour retenir et fidéliser les profils « tech », Artefact mise sur la formation.
En 8 ans, Artefact est passée d’une vingtaine de personnes travaillant à Paris à près de 1000 collaborateurs répartis dans 16 pays. Pour conserver la culture de leur entreprise dans ce contexte d’hyper-croissance, les fondateurs de cette société de conseil en services data ont compté sur un management décentralisé. Au-delà de ce premier challenge, Artefact doit également recruter massivement des profils tech à la fois rares et sur-sollicités. Pour les attirer et les retenir, l’entreprise a misé sur la formation. Vincent Luciani, CEO d’Artefact, revient sur la stratégie managériale et RH adoptée face à ces enjeux.

Comment conserver une culture d’entreprise lorsqu’on est une entreprise en hyper-croissance ?


Selon l’anthropologue Dunbar, le cerveau humain limite à 150 personnes la taille d’un groupe d’individus. Nous avons très vite dépassé ce nombre de collaborateurs. Pour conserver notre ADN, c’est-à-dire une entreprise agile et flexible, nous avons décidé de fonctionner de manière décentralisée. Nos équipes, quelles que soient leur situation dans le monde, forment des « chapters » qui fonctionnent de manière autonome : ils décident de leur salaire, de leurs recrutements, de leurs prix, de leurs formations et de leurs promotions.

Cela a pour avantage de faciliter la prise de décision, d’être en accord avec notre culture très entrepreneuriale. En revanche, cela peut créer des silos et faire perdre un peu de perspective sur les objectifs globaux de l’entreprise. C’est pourquoi nous avons différents événements réguliers pour partager les expériences de chaque équipe, dans chaque pays. A titre d’exemple, nous avons les global training days, un rendez-vous mensuel qui réunit tous les pays autour de leurs succès. Nous avons également les Retex du vendredi, qui sont locaux et plus axés clients.

En parallèle, votre activité demande de recruter des profils à la fois rares et très demandés par les startups et GAFA. Comment faites-vous la différence ?


Le secteur de la data est en plein essor et le nombre de personnes formées sur ces métiers n’est pas suffisant pour répondre à la demande. Il y a donc une vraie compétition sur les profils entre les multinationales, les GAFA, les startups et les sociétés de conseil. Sachant que nous n’avons pas tous les mêmes moyens pour les attirer : les GAFA et les startups à fonds quasi-illimités ont créé une sorte de dumping sur les salaires.

Nous avons donc mis en place un certain nombre de bonnes pratiques. La première est de proposer un programme de formation. Nos collaborateurs entrent et restent chez Artefact car ils sont attirés par la possibilité d’apprendre en continu, ce qui est essentiel dans un secteur en évolution permanente. Nous proposons donc 100 heures de formation par an en moyenne qui répondent à des grilles précises. L’apprentissage et les certifications se font à la demande et se déroulent sur une plateforme self-service. Par ailleurs, nous favorisons le partage entre pairs lors de rendez-vous spécifiques comme les « digital tech coffee » ou les Retex. Enfin, tous les nouveaux arrivants sont parrainés par un collaborateur plus ancien pour être coachés.

Nous avons également construit des parcours de carrière types, pour que les salariés se projettent dans l’entreprise sur le long terme. Nous avons des parcours Delta, pour les commerciaux, et des parcours Gamma pour les profils tech. Traditionnellement, évoluer dans un cabinet de conseil signifie devenir manager. Or, tout le monde n’aspire pas forcément à l’être. Les parcours que nous proposons tiennent compte de cela et mettent aussi en valeur des parcours de spécialistes 100% tech. Nous favorisons également les réorientations, pour qu’un consultant puisse devenir data analyst et qu’un ingénieur puisse devenir commercial, par exemple. Nous avons aussi mis en place des initiatives plus tactiques comme les échanges internationaux. Une personne qui serait restée 4 ans chez nous, restera un an de plus si elle a la possibilité de travailler dans le pays de son choix.

Quels sont les résultats de cette politique particulière ?


Nous avons un suivi mensuel de notre NPS sur plusieurs dimensions : l’apprentissage, l’intérêt pour les projets, la relation avec les pairs et l’impact sur les clients. Cela nous permet de remonter des sujets du terrain et de réagir très rapidement, si besoin. C’est d’ailleurs comme cela que nous avons créé nos « chapters » ou encore notre grille d’évolution salariale.

Par ailleurs, notre taux d’attrition est de 4 à 5 ans, ce qui est inférieur à la moyenne du secteur. Il faut dire que nous nous sommes particulièrement penchés sur le cas des mid-managers, soit la population qui risque le plus de quitter la société. En effet, être manager c’est changer totalement de métier et de posture. C’est un constat valable dans toutes les entreprises et particulièrement dans les cabinets de conseil. Nous avons donc plusieurs dispositifs pour les retenir : 50 heures de formation en plus que les autres salariés, notamment pour travailler les soft skills comme le management, la communication, la gestion des clients… Nous distribuons également des actions à tous nos managers et ils peuvent investir à nos côtés dans l’entreprise.

Les dispositifs pour attirer et fidéliser vos collaborateurs sont-ils les mêmes en fonction des pays ?


Non, et cela nous ramène à notre fonctionnement décentralisé. Par exemple, nous avions un taux d’attrition très élevé à Shangaï car nous subissions la pression des BATX. En outre, la Chine s’est beaucoup refermée sur elle-même depuis le COVID et a fixé des taxes salariales très élevées pour les expatriés. Nous avons donc ouvert un deuxième bureau à Shenzu pour proposer à nos collaborateurs chinois de rester près de chez eux. Nous avons également mis en place un système de Synthetic Equity, un bonus retardé sur la performance de l’EBITDA de l’entreprise très courant dans les startups chinoises.

Notre politique de télétravail est très différente selon les pays. Le volume de télétravail est plus élevé aux Etats-Unis et au Brésil, par exemple. Le télétravail est en général important pour attirer et fidéliser les profils que nous recherchons, peu importe où ils se trouvent dans le monde.

La recherche de sens dont on parle beaucoup depuis la pandémie est-elle importante chez vos collaborateurs ?


Oui, et ce sujet s’appuie sur trois piliers. Le premier est notre activité en elle-même car nous avons de nombreux projets data concernant la réduction de l’impact carbone, la réduction des stocks ou l’optimisation des matières premières chez nos clients. Nous allons également organiser l’an prochain des hackathons dans 5 entreprises du CAC 40. Ces événements, co-créés avec Google, ont pour objectif de les aider à trouver des cas d’usage liés à l’environnement. Le deuxième est notre programme “impact” dont la pierre angulaire est notre school of data. Notre objectif est d'aider 1000 personnes à se réorienter d’ici à 2025. Les apprenants sont soutenus par des collaborateurs bénévoles qui les accompagnent pour trouver du travail, passer des entretiens, entretenir leur réseau… Enfin, nous travaillons sur l’éthique de l’Intelligence Artificielle. Nous finançons la chaire Good in Tech, pour travailler sur la limitation des biais des IA.

Source : KPMG


Mardi 7 Février 2023



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